Lina Ben Rejeb
Nous vivons trop près des machines

La Boîte I Octobre 2019
La Boîte Hors Tunis I ISAM Gabès I Mars 2020

Texte de Lina Ben Rejeb.
Ensemble est un mot important. Il est question de faire lien en faisant image de la trace, de placer l’humain au cœur du projet : impliquer l’autre dans le processus de fabrication et de construction. La trace est ici revisitée, déplacée, recomposée. Après avoir longtemps pensé la finitude d’un geste (le tracé), d’un outil (le copieur), il est question dans cette exposition de déplacement : nos routines d’aujourd’hui, comme celles visibles dans l’exposition Nous vivons trop près des machines (creuser, dupliquer, appliquer, laver, répéter et superposer) sont peut-être déjà des ruines. Voir au passé, raconter ces hommes autour d’une longue table s’échinant à faire trace et dire ce long tissu blanc qui peu à peu se fait porteur d’empreintes, de signes, mémoire des gestes : palimpseste. Ce métier, celui d’imprimeur de sari, tend à disparaître. Comme tant d’autres, il s’épuise en quelque sorte puisque les machines remplacent les hommes. Délocaliser la pratique est une tentative de questionner autrement ces routines qui se perdent afin de conjurer cette peur d’un monde distordu. A peine le temps de s’approprier une tâche qu’elle se trouve déjà placée au rang des oubliés. Obsolètes, comme nos machines, nos usages se trouvent sans cesse renouvelés.

Il y a d’abord ceux qui ont produit ces traces: les travailleurs en Inde, et ceux qui les composent, ceux de La Boîte. Entre les deux, un métier: celui de l’artiste qui cherche à questionner la notion même de travail à l’ère de l’obsolescence, à l’ère de la globalisation et de la délocalisation.

L’idée est de donner à voir un parcours, celui de la construction d’un support qui fait œuvre (produire un tampon en bois, révéler un tissu) pour réfléchir ensemble à la notion de métier, à celle du travail ainsi qu’à notre empreinte, ce qu’on devient une fois que le métier (ou la fonction) aura disparu. L’enjeu parait central à l’ère de cette obsolescence qui nous amène à poser un regard nostalgique sur ce qui continue à être, à exister, différemment.

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