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Ali Tnani
It has never been to survive
Septembre 2013 I Décembre 2013
La Boîte I Un lieu d’art contemporain
Imaginée à la fois comme un prolongement à l’exposition personnelle Contre-espaces à la galerie A.Gorgi, et, comme un volet à part entière de mon travail autour des restes, l’exposition de la série Others spaces dans l’espace de la Boîte venait à point nommé. Au moment où ma pratique artistique convergeait naturellement vers de nouveaux horizons, cette exposition évoquait les prémices d’une autre démarche à venir. Désormais, ces espaces autres ne sont plus isolés et aucune cartographie n’est possible pour le moment. Ils sont traversés sans interruption par les corps et les données.
Others spaces est une série de 8 photographies (argentique, moyen-format) réalisée lors de mon premier séjour à la Cité des Arts de Paris en 2012 et éditée à l’occasion de l’exposition It has never been to survive à La Boîte, en 2013. Mon intérêt pour les espaces vides et isolés trouva dans les espaces résiduels du réseau souterrain une forme refuge. Invisibles le jour et parfois la nuit, ils apparaissent lorsqu’ils sont éclairés.
Ali Tnani
« Ali Tnani (1982) est de ces créateurs « durs ». Cet artiste multimédia, dessinateur, installateur et photographe avoue notamment un faible pour les traces, l’archive, les espaces de transition. Ce que nous délaissons volontiers, ce qui demeure en suspension faute que nous prenions plaisir à le regarder. L’univers qui attire Tnani est aussi celui où nous vivons mais, à dire vrai, côté ombre, côté caché. Notre monde ? Celui-ci n’est pas fait que de figures de lumière, il se construit aussi contre l’apparition, par le négligé, par le mis-de-côté, voire par effacement. Lors de son exposition à La Boîte, « It Has Never Been To Survive », Ali Tnani, à dessein, propose à notre attention plusieurs photographies au contenu indiscernable. Une provocation ? Une invite, plutôt, à affûter nos sens, à aiguiser notre perception. Sur un fond blanc, posés sur une ligne d’horizon, des objets de forme abstraite indéfinissable s’offrent à nos yeux interrogatifs. Fragments ? Matériau récupéré ? Formes utiles ? Éléments sans possible définition
tributaires de cette culture de l’« informe » naguère chère à Georges Bataille ? Ce type d’offre visuelle incertaine, hors pedigree, se nourrit chez Tnani de ce que lui-même nomme la figure du « contre-espace » ou de l’« espace autre » : une formulation connotant la « différence ». En atteste, encore, sa série photographique Other Spaces, au contenu à la fois sibyllin et explicite. Other Spaces #5 : une photographie couleur de format carrée nous présente, en contre-plongée, la vue d’une anonyme cage d’escalier métallique, de celles qui s’accrochent au revers des bâtiments ou au cœur des usines, non faites a priori pour être vues. Other Spaces #8 : cette autre photographie, de la même eau
trouble, révèle la vue banale d’un rebord de trottoir. Presque rien donc, du non-sublime mais un élément essentiel, pourtant, de la réalité. Sur
quelle surface marchons-nous, dans nos villes tentaculaires, sinon sur celle d’un trottoir, qui porte et rend notre déplacement aisé ? Artiste que fascine l’anti-spectacle, Ali Tnani nourrit avec ses « espaces autres » le thème allotopique, cher naguère au philosophe Michel Foucault, il agit en archiviste de ces lieux humains essentiels que l’on met hors-jeu faute qu’ils sécrètent une plus-value symbolique. « Mon intérêt pour les espaces vides et isolés trouve dans les espaces résiduels du réseau souterrain une forme refuge, explique Tnani ; invisibles le jour et parfois la nuit, ils apparaissent lorsqu’ils sont éclairés (…). » Des figures de rien? Assurément non, continue-t-il. Ces espaces « sont traversés sans interruption par les corps et les données ».
Paul Ardenne